【诗与译】虚无的滋味 —— 波德莱尔
你那时满腔斗志,空虚的心灵
猛蹬马刺的希望,也曾驾驭你的热情
如今你老了,谁还理你!歇着吧
别害臊,免得你抬脚就原地绊倒!
算了,我的心,能昏睡也挺好!
精神的溃败者,衰朽的骗子手,对你而言
爱,恋,都兴致寥寥,吵,闹,也觉不出味道
铜管笙箫,哀歌小调,诀别的时候到了
欢愉啊,这灵魂自甘沉沦,请别打扰!
醉人的春光也失去了芬芳!
光阴!光阴在吞噬我,分秒不停
正像人的身躯在暴雪中僵硬
自高空俯瞰这名为地球的星体
人间的庇护所对我没有意义!
雪崩啊,带上我再堕落吧?
—— 波德莱尔 - 恶之花
Le goût du néant
Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,
L'Espoir, dont l'éperon attisait ton ardeur,
Ne veut plus t'enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.
Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute.
Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur,
L'amour n'a plus de goût, non plus que la dispute ;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !
Plaisirs, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur !
Le Printemps adorable a perdu son odeur !
Et le Temps m'engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur ;
Je contemple d'en haut le globe en sa rondeur
Et je n'y cherche plus l'abri d'une cahute.
Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute ?
—— Charles BAUDELAIRE -- les fleurs du mal
猛蹬马刺的希望,也曾驾驭你的热情
如今你老了,谁还理你!歇着吧
别害臊,免得你抬脚就原地绊倒!
算了,我的心,能昏睡也挺好!
精神的溃败者,衰朽的骗子手,对你而言
爱,恋,都兴致寥寥,吵,闹,也觉不出味道
铜管笙箫,哀歌小调,诀别的时候到了
欢愉啊,这灵魂自甘沉沦,请别打扰!
醉人的春光也失去了芬芳!
光阴!光阴在吞噬我,分秒不停
正像人的身躯在暴雪中僵硬
自高空俯瞰这名为地球的星体
人间的庇护所对我没有意义!
雪崩啊,带上我再堕落吧?
—— 波德莱尔 - 恶之花
Le goût du néant
Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,
L'Espoir, dont l'éperon attisait ton ardeur,
Ne veut plus t'enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.
Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute.
Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur,
L'amour n'a plus de goût, non plus que la dispute ;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !
Plaisirs, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur !
Le Printemps adorable a perdu son odeur !
Et le Temps m'engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur ;
Je contemple d'en haut le globe en sa rondeur
Et je n'y cherche plus l'abri d'une cahute.
Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute ?
—— Charles BAUDELAIRE -- les fleurs du mal